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Pièce de théâtre des Terminales

En fin d’année, les 21 et 22 juin, une partie de la classe de Terminale a joué une pièce de théâtre originale, écrite par l’un des élèves, Baudouin Chavasse. Le thème en était l’art contemporain.

Le drame surréaliste Au retour de l’Expo a vu le jour des mains de Baudouin Chavasse dans le cadre  d’un important travail de philosophie sur l’art aux alentours de janvier 2024. Dès sa sortie, le choc est total : dans un genre à la fois novateur et parodique, la pièce a vite conquis les lecteurs. Ainsi, la troupe composée d’élèves de la promo 0 de HLP a joué cette pièce pour le solstice d’été. Cette pièce a tant posé de questions que nous vous devons des explications. L’auteur Baudouin Chavasse, le metteur en scène Cyprien Menant et l’acteur Colomban Domergue répondent aux questions des spectateurs.

  • Le spectateur : Bonjour d’abord, bravo ensuite ! Comment assumer des rôles, permettez-moi, très osés, et a fortiori devant ses camarades, professeurs et parents. Je pense notamment à celui du pot de fleurs noires ou à Daisy la femme de ménage ?
  • L’acteur : C’est finalement la question de l’humilité. Elle m’était posée aussi par les doubles rôles qui supposent un travestissement constant. Et donc c’était un enjeu pas forcément facile à saisir car il fallait aussi s’oublier soi-même. C’est ce qui a permis à cette pièce d’être vraiment drôle.
  • Ma question est assez simple comme cette pièce ne l’est pas : quelle nécessité de se représenter en public à la fin de l’année ?
  • L’auteur : D’abord je remercie chaleureusement le public qui est venu à cette pièce. Une première réponse serait que ce n’est pas ma volonté propre : j’ai été poussé en quelque sorte par mes amis et par ma classe qui, premiers publics, ont décelé en elle des trucs percutants et mon professeur de philo m’a dit qu’il serait là. Tout s’est enchaîné depuis tant et si bien que nous avons placardé des affiches dans tout Hautefeuille. Rendre visible cette pièce n’est pas uniquement le fait de l’auteur, mais de plusieurs.
  • Quelles sont les ressources dont tu as eu besoin pour écrire cette pièce et pour pouvoir la présenter au public ?
  • L’auteur : Au niveau de l’écriture il m’a fallu une feuille et puis un stylo, un ordinateur surtout et puis un cadre, un cadre très très très très très très porteur qui était celui de la classe de HLP mais aussi, aussi et surtout celui de l’amitié. J’ai en effet  souvent écrit des actes alors que mes amis étaient autour de moi en train de parler, de discuter, de s’amuser. Par exemple, l’idée de l’harmonica m’est apparue alors que justement Aubin, qui est un personnage réel, qui existe vraiment, s’est mis à jouer de l’harmonica et a énervé tout le monde dans la salle d’étude. C’est à ce moment-là que j’ai pu penser à cette farce qui est celle de l’harmonica.
  • Le metteur en scène : En outre on a pu compter dès le début du projet sur le soutien indéfectible du lycée Hautefeuille qui nous a prêté des locaux, du matériel, etc. Mais toute cette pièce, évidemment, c’est aussi l’aboutissement de toute une formation en littérature, en philosophie qui nous a permis de faire fructifier ce que nous ont donné nos professeurs en créant à notre tour.
  • Comment se sont créés les types, les “topos” des personnages ?
  • L’auteur : Je crois en la théorie de la résurgence inconsciente. Nous entendons moults media que nous interprétons à nouveau sous forme de topos, de caractères qui viendront s’imprimer sur la feuille et ainsi révéler des comportements facétieux et qui viendront irriguer toute la trame et provoquer des moments comiques.
  • Cher Cyprien, j’aimerais vous poser une question existentielle : comment avez-vous pu dans votre emploi du temps combiner théâtre et révisions du bac ? Parce que je vous rappelle que la présentation était juste après les épreuves du bac.
  • Le metteur en scène : Evidemment la pièce de théâtre a été un projet très chronophage tout au long de l’année. Mais le projet, je pense, est venu suffisamment tôt, donc dès avril, pour l’organiser sereinement étapes par étapes. On a quand même bien anticipé. Toutefois, c’est vrai que nous, l’auteur entre autres, avons énormément travaillé avant le bac mais manifestement, ça n’a pénalisé personne. C’est aussi une réalisation qui ne peut pas desservir avant le bac car comment mieux investir son temps ? Enfin, notre pièce se veut une sorte d’échappatoire au sérieux. La créer à la place du travail fait donc sens et ne peut que plus amuser. Les rires de la salle nous ont confortés dans cette idée.
  • Pourquoi créer une nouvelle pièce et non pas jouer une pièce du répertoire classique ?
  • L’auteur : Somme toute vous voulez que je ne crée pas ? Mais simplement enfin que je crée qu’à moitié. Mais je pense que faire une pièce classique aurait ennuyé les spectateurs. Et surtout, surtout, on  aurait eu beaucoup moins de succès et d’acclamations si nous avions repris quelque chose. Voilà, en créant on reçoit beaucoup plus de compliments. De plus, l’écriture est une passion que j’ai et puis c’était super d’écrire. Et j’avais un objectif pour la première fois de mon année de terminale.
  • Et l’art dans tout ça ?
  • L’auteur : L’art est présent parce que tout d’abord c’est une pièce de théâtre et le théâtre est un art. Et puis l’art était évidemment le thème principal de cette pièce ; ensuite l ‘objectif était quand même de poser des questions philosophiques sur l’art. Nous voulions apporter des pistes de réponse. Mais je n’ai pas de réponse : je ne me sens pas prêt pour répondre à des questions aussi ténues sur l’art et je laisserai mon metteur en scène compléter cette réponse.
  • Le metteur en scène : C’est évidemment une pièce sur l’art ; un élève qui rentre d’une exposition d’art contemporain, qui s’en trouve tout déboussolé et qui se pose donc plein de questions. On a essayé de mettre en scène de manière artistique ces questions sur l’art. Et c’est sûrement une caractéristique très belle de l’art, c’est qu’il interroge sans cesse. On a essayé de faire quelque chose d’assez total avec de la musique, des peintures, dont une créée sur scène, des costumes et une certaine poésie propre à Baudouin Chavasse, que je trouve assez fabuleuse. A mon sens c’est donc une œuvre d’art totale qui est avant tout une expérimentation mais qui est devenue une réalisation.
  • Pourquoi faire une pièce aussi incompréhensible ? Parce que je suis sorti de cette pièce complètement débordé : c’est une pièce de ravagés !
  • Le metteur en scène : Je ne pense pas que cette pièce soit incompréhensible. Mais c’est vrai qu’on aime souvent, à mon sens par paresse, tout comprendre dans une pièce pour en avoir une position ascendante et une sensation de maîtrise. C’est aussi le plaisir pédant de retrouver les codes classiques. Mais notre pièce est une pièce qui bouscule et qui, pour construire de nouvelles idées, doit en battre en brèche certaines autres. Toute la pièce, avec sa mise en scène, fait se répondre en miroir l’incompréhension du personnage principal au sujet de l’art et la surprise amusée et déconcertée du spectateur qui, par son incompréhension, rejoint Aubin. C’est par là que le théâtre agit et peut guider la réflexion. Derrière ses airs de farce burlesque et absurde, cette pièce suggère en fait une certaine catharsis.